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Zorro-la-calculette

LE MARCHÉ XXVII

Ils ne seraient pas vilains, ces bancs qu’on a installés dans les gares d’Ile-de-France. Le dessin en est élégant, la couleur agréable. Mais quel étrange matériau ! L’hiver, ils sont d’un abord si glacial et si glaçant pour la partie de l’anatomie humaine appelée à entrer en contact avec eux qu’on doute si leur conception n’est pas due à des spécialistes des hémorroïdes en mal de clientèle. Les accoudoirs dont ils sont nantis, beaucoup trop bas pour être utiles, ne servent qu’à séparer des fessiers. C’en était trop, l’autre jour, pour l’impatience d’une dame imposante. Elle s’est soudain dressée en nous livrant, à tue-tête, cette bouleversante confidence : « J’ai le cul au frigo ! » Une telle épreuve m’a ému, j’ai voulu savoir. On m’a chuchoté que c’étaient des épouvantails à SDF. Les pauvres, c’est  peu design ! De fait, pour élire domicile sur ces bancs, il les faudrait contorsionnistes, et de descendance lapone. Pauvre histoire, n’est-ce pas ? Mais j’étais resté debout, je pouvais rêver. J’étais dans l’entreprise qui fabrique ces bancs. Magnifique société. Gestion superbe. Management novateur et hardi. Technologie pointue comme bec de rapace. Dialogue social d’une qualité ! Hommes, cadres à rendre jaloux le petit père des peuples. Tradition, projets, confort des toilettes ! Ce jour-là, on fêtait quelque chose ; les grands chefs serraient des mains dans les ateliers, chaleureusement, humainement. Il y eut un discours, des applaudissements, puis un de ces petits silences où l’émotion aime à se recueillir. Soudain, venue d’on ne sait où, une voix tranquille s’éleva et constata : « Ils sont beaux, nos bancs, mais ils sont cons. » On venait de changer de démocratie.
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Il a quarante-deux ans ; quand on lui parle de ses soixante-dix bougies, il s’agace. Il dit qu’il a le temps. C’est vrai. Il a le temps. Enfin, peut-être. N’empêche. Ça fait toujours mal, un vieux jeune homme. Bien sûr, je me suis interrogé. Le dépit d’un ancien ? Je ne crois pas, je ne crois vraiment pas. Penser au grand âge, le mien ou celui des autres, fouettait ma jeunesse, bien sûr, lui donnait de l’entrain, et des couleurs, et de la fougue. Mais autre chose aussi. Le sentiment aigu de la fragilité. Ce vieillard, je l’étais déjà, je l’étais en puissance. Je ne m’en sentais pas moins jeune. Tout au contraire. Je portais Anchise sur mon dos. J’étais jeune pour lui, j’étais jeune pour moi, j’étais jeune pour tous, pour tout. Mais de là à penser que j’avais le temps ! Je sentais surtout que je n’avais rien du tout, que personne n’avait rien du tout, que l’exubérance du désir et les rhumatismes jouent dans le même camp. Je n’avais pas vingt ans : la jeunesse m’avait, et le monde avec moi. Et c’était infiniment joyeux. Avec un vilain arrière-goût, tout le monde connaît ça :

J’entends si bien le temps saigner
Que tout moment m’est le dernier

Il était vraiment trop triste, Aragon ! Mais lui donner des leçons d’espérance, j’aurais trouvé ça lamentable, comique. Tout était dans la musique. Tout est toujours dans la musique.
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Des femmes aux plus hautes fonctions ? M’est égal. Je choisirai un programme, pas un sexe, voilà tout, à supposer qu’il y ait quelque chose de potable dans les rayons. Mais on ne me fera pas dire qu’une plus large participation des femmes au pouvoir constitue en soi un progrès. Ce pourrait être le cas ; ce ne l’est pas. Quand les femmes entrent en piste, c’est le cirque qui y gagne, pas elles : ce qui signifie que tout le monde, hommes et femmes, y perd. Celles qui ne sont pas trop pressées d’arriver pourraient peut-être y réfléchir. Mais, moi, si j’étais une femme ? Si j’étais une femme, je penserais ce que je pense aujourd’hui, rien de plus, rien de moins : le pouvoir, je m’en foutrais. Jupe ou pantalon, il n’est aujourd’hui qu’un jeu d’ombres ; les vrais enjeux et la vraie liberté sont ailleurs, et cela l’emporte sur tout, et pour tout le monde. Les hommes ne le voient pas ? Certes ! Et alors ? Qu’est-ce qui oblige les femmes à être aussi tartes qu’eux ? Est-ce parce qu’elles se veulent autonomes qu’elles tiennent à les imiter ? Si j’étais femme, je dirais aux hommes, avec Montherlant, d’aller jouer avec cette poussière ; je le leur dirais mieux que je ne peux le faire, avec la puissance d’une ironie affectueuse.
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D’accord, la femme est l’avenir de l’homme. Mais il faut regarder les textes de près. Savez-vous que, dans le même Fou d’Elsa où a fleuri la formule, il est parlé de « l’imparité merveilleuse qu’il y a entre l’homme et la femme » ? (p. 98, édition Gallimard, Collection blanche) Embarrassant, n’est-ce pas ? On trouve ce blasphème à la modernité dans un commentaire que Zaïd, le jeune disciple du personnage central du livre, le Fou, le Prophète, ajoute à un poème de son maître, L’Aube. La construction et les rimes en sont étranges, incertaines. Ce poème, je vous défie de le lire sans que les larmes vous viennent aux yeux. Vous y entendrez parler du monde où vous vivez :

Il ne roulait en moi que les dés de l’écho
Dont les hasards m’étaient écoles

Il en était ainsi avant pour le poète, avant elle, avant qu’elle ne vienne, avant Leïla, ou Elsa, ou Elvire. Pas l’infirmière de l’âme, pas le reposoir à fantasmes, pas l’apparition céleste, pas l’image sublimée de la mère. L’être impair, ni pire ni meilleur, mais inassimilable au même. Étrange poème, vraiment. Plus le chant d’amour monte, plus les vers se disloquent. À ceux qui reprochent à son maître la bizarrerie de son poème, Zaïd répond : « Est-ce que le soleil levant rime suivant la règle avec la terre qu’il inonde ? » Ainsi l’homme et la femme. « Il dit encore, plus tard y revenant, que la seule rime parfaite est l’homme et la femme qui ne riment point selon les traités. »
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« Cette part de l’obscur comme une grande rame plongeant dans les eaux ». Michel Cournot dit que ces mots de René Char le suivent. Que je le comprends ! Et quel cadeau de nous les faire connaître ! Il est là, exactement là, mon reproche majeur, mon reproche unique au monde moderne : cette part de l’obscur, il la cache, il l’occulte, il l’élude. Ou il la travestit, il la viole, il la quadrille de ses infamies marchandes, de ses obsessions subalternes. Il nous prive de nos bases et de nos sommets, du combat spirituel « aussi brutal que la bataille d’hommes », du grand djihad où nous attendent et la vérité et la liberté. Et c’est pourquoi le monde moderne, je n’ai jamais pu l’aimer. Ni par ce que j’ai de religieux ni par ce que j’ai de païen, ni par ce qui me précipite vers le bas ni par ce qui voudrait m’attirer vers le haut. Je le déteste pour moi et pour ceux que j’aime, et pour tous les autres, et pour les paumés qui l’alimentent. Je l’ai détesté dès mon plus jeune âge, chaque épisode de ma vie m’a fait le détester davantage, je mourrai en le détestant, riant à gorge déployée des leçons d’amour que n’auront cessé de me fourguer de lugubres apprentis de l’ennui et du malheur. Cette grande rame plongeant dans les eaux, image follement claudélienne, voilà la seule certitude que j’aie toujours voulu sauver : en moi, à chaque fois que je sombre ; dans les autres, dès qu’il m’a semblé qu’ils me prêtaient un peu de leur confiance. Je ne peux en dire plus. Mettez un mot sur ce mystère, recommandez-vous de lui, bâtissez sur lui je ne sais quelles complicités tordues : il s’évapore. Ramer ! Les gens disent qu’ils rament quand la vie est dure ! Ce n’est pas ça, ramer ! C’est du canotage au Bois de Boulogne, ça ! S’ils ramaient vraiment, ils ne prendraient pas cet air douloureux qu’un crétin arborait ce matin dans l’autobus parce qu’il le trouvait inconfortable ! C’est superbe de ramer, quand ça rame au-dessous de vous à des profondeurs dont l’ordinateur n’aura jamais idée ! C’est immense de se sentir relié par le monde du dessous à ce qui vous échappera toujours de vous et des autres ! C’est époustouflant d’oublier l’idée qu’on a de soi, de la vie, de tout ! Plongez, gratteurs de surfaces, mais plongez donc, bordel, plongez vers le haut !
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À propos de bordel, quelle démonstration ! Grâce aux Allemands, un trucage majeur vient de livrer ses secrets. La défense de la dignité des femmes, vous connaissez ? Alors, quoi ? Quand on déporte des femmes de l’Est pour soulager les beaufs chauffés par l’ambiance des tribunes, elle prend ses jours de RTT, la défense de la dignité des femmes ? Terrifiante fumisterie de ce qu’ils appellent tous les valeurs : comprendra-t-on un jour, oui ou non, de quoi il retourne ? Cessera-t-on un jour de faire semblant ? Quand elles s’incarnent dans des corps réels, avec des sexes et des seins et des cuisses et un dégoût qui monte, ils en font quoi de leurs valeurs ? Quel homme, quelle femme politique s’est risqué(e) à les défendre, ces encombrantes valeurs de chair et de sang ? Lequel, laquelle s’est dit qu’être battu(e) en s’opposant à quelques fumiers, c’était finalement bien plus intéressant que de dégoiser des laïus rédigés par d’autres devant l’argenterie de l’Élysée ? Exiger que le commerce de viande humaine, au moins, prenne ses congés pendant le Mondial, c’était excessif ? La construction européenne n’y aurait pas survécu, la pauvre chérie ? Oui, le peuple a raison, le gros peuple a raison, le gros jugement du gros peuple est le bon : ils sont tous du même côté, du côté de la calculette. Mais patientons. Les vertus publiques ne sortent pas par gros temps. Ils vont bientôt recommencer à donner des leçons de droits de l’homme au monde entier. Et si un pauvre gars abruti de management vicieux pète les plombs, un soir, devant sa femme, les Zorro-la-calculette en larmes organiseront des défilés. « C’est pas dangereux pour les sondages, les mecs, on peut s’indigner ! »
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La part de l’obscur, la nuit des corps, des esprits, des âmes, moins le pouvoir y touche, mieux nous nous portons. Qu’il enlève ses pattes de là. Les quelques règles classiques conçues il y a des millénaires suffisent, et des tribunaux pour les faire respecter. Artémis est une horreur, mais c’est un minuscule scandale au regard de l’insoutenable fumisterie moralisante à laquelle tout le monde semble se résigner. Hypocrite par construction, elle aggrave la lâcheté et la servilité des citoyens, elle truque leurs questions élémentaires, elle colonise leurs ressources fondamentales. Et pourtant l’affaire Artémis n’empêchera pas les menteurs de postillonner leurs valeurs, ni les imbéciles de les avaler. Après les culs bénis, les culs sociaux.
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Les firmes se considèrent désormais comme des « partenaires concurrentiels ». En français, ça se dit complices, non ?
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Addiction. Peste, quelle science ! Pourquoi pas accoutumance ou dépendance ? Parce que ça n’égaie pas l’élocution de la même pointe de sadisme branché ? Addiction, chez nous, sonne chirurgical, pharmaceutique. L’accoutumance à l’alcool, c’est du modéré : pas trop, petit, pas trop, garde la tête fraîche ! C’est gentil ; ça conseille. Fais gaffe ! Addiction est scientifique, impitoyable. Pas de complicité avec le monde, il est dangereux. Les humains avec les humains, les choses avec les choses. Fais voir tes mains si elles sont propres. Accoutumance renvoie à la raison, à la sagesse ; addiction, à la méfiance. Chacun dans son île, c’est la loi universelle ; les relations se distribuent du haut, l’Europe, le fric, le foot. Pas de familiarité avec la vie, s’il vous plaît ; elle est sérieuse et professionnelle. Pas de soucis, tout est prévu ; même la case bordel, on l’a vu. Accoutumance, c’est un plumeau ; addiction, une débroussailleuse. Accoutumance veille au grain : c’est ta santé qui nous intéresse. Addiction, c’est ENA, c’est chaisière : c’est le principe qui compte, le conseil d’administration, le comité central. Dans accoutumance à l’alcool, le mot important, c’est alcool. Dans addiction à l’alcool, c’est addiction. Accoutumance alerte sur la complexité de la chose ; addiction sacralise la rigueur du principe. Ne feriez-vous pas une addiction à l’amour, par hasard ? À la vie mystique ? Ne souffrez-vous pas d’une addiction à Dieu ? Reste pur, camarade partenaire concurrentiel, pur pour le progrès sans fin, sans commencement, sans queue, sans tête.
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Quand j’entre dans un avion, je me sens important. Quand je monte dans un train, je suis heureux. Comment faire pour monter dans un train à chaque minute, à chaque seconde, à chaque souffle, à chaque regard ? Je ne peux quand même pas me faire contrôleur !
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Protester, râler, gueuler, ma mère m’a enseigné cette vertu dès mon plus jeune âge. Le jeu a perdu beaucoup de son charme. Le monde entier joue Shakespeare en boucle, pourtant : les traîtres, les délirants, les marchands de Venise, les yeux crevés des rossignols, la populace versatile, les rots des goinfres, rien ne manque. Précisément. Trop de boucs émissaires, plus de bouc émissaire. Le polémiste d’aujourd’hui doit être au four et au moulin : ce n’est plus de l’indignation, c’est de la monomanie criarde. L’index qui tremblote légèrement au bout du bras tendu – comme la ligne quand ça mord, peuchère ! – ça devient ridicule. L’autre jour, un procureur déniaise les jurés. Ce n’est pas sur ses victimes que l’accusé pleure, affirme-t-il, c’est sur lui-même ! Grotesque présomption ! Sonde-t-il les reins et les cœurs, ce procureur ? Ce ridicule, je le perçois quand, d’aventure, quelqu’un approuve ma colère et lui fait écho : je sens alors qu’il est urgent de changer de camp. Non vraiment, l’indignation et la polémique ne marchent plus. Peut-être parce que s’indigner, c’est toujours faire appel à un ordre, à une loi maternelle, rassurante. Mais la loi est en congé. Mon indignation se coince dans ma gorge, elle reste perchée en moi comme un chat sur un toit.
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Nous sommes plus mauvais que nos ancêtres ? Du tout ! Les temps ont changé, voilà tout. L’indignation, c’est l’étonnement devant la violence. Telle était la pose d’une société qui faisait de sa propre violence un ordre sacré, alimentant ainsi la fiction d’une brutalité foncièrement bonne, la sienne ; la violence interdite, coupable par définition, servait indirectement, elle aussi, à conforter l’ordre. Occultation de la violence, logique du bouc émissaire, René Girard a expliqué tout cela. Pour mille et une raisons, nous en sommes maintenant à la violence dévoilée : l’indignation tombe à plat, on peut dénoncer tranquille sur TF1. J’ai un peu honte de dire les choses d’une façon aussi sommaire, je les pressens plus que je ne les comprends. Le bien est toujours le bien, le mal reste le mal : mais nous, nous ne sommes plus exactement ce qu’étaient nos ancêtres. Ils étaient porte-parole, hérauts, sauveurs autoproclamés ou, tout simplement, partisans, petits soldats, militants. Ils étaient représentants en vérité comme d’autres en couches-culottes : la vérité les intéressait pendant les heures de travail. Ils étaient témoins ; concernés, sans doute, mais indirectement. Notre expérience du monde est désormais immédiate et partagée. Du monde, donc du bien et, plus souvent qu’à son tour, du mal. Nous jouons sans filet. C’est extrêmement dur, nous cherchons à éluder. Voilà pourquoi nous accordons une telle place à l’image, pourquoi nous nous acharnons à faire semblant, pourquoi nous multiplions les caricatures, les simulacres, les impostures. Nous sentons trop bien que nous ne sommes pas des images, que le temps du semblant est fini : cette évidence nous épouvante. La vraie vie en nous nous épouvante ! Nous sommes en live, quoi ! Mais un live qui ne s’inscrit sur aucun registre de représentation ! Autant dire dans la vie. Nous sommes vivants en direct ! Comme si c’était la première fois ! Hallucinant de simplicité ! Et les conséquences en chaîne, pour tous, pour tout, innombrables !
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Le magnifique Pessoa, entièrement ignoré de son temps, entassait ses manuscrits dans une malle. Moi, c’est le contraire. Je suis dans un grenier poussiéreux, à genoux devant un vieux coffre et je déballe, je déballe, je déballe ! Non pas remplir ! Vider ! Avec tendresse, bien sûr, mais vider. Avec respect. Respecter, c’est voir une deuxième fois, réenvisager. Cet homme de principes, je ne le suis plus, pas la peine de me le cacher. Me juge qui veut, je l’emmerde. Et moi-même, me jugeant, je m’emmerde. Au plus près, être au plus près, vivre au plus près, là où m’attend la distance infinie de l’être, pas dans les couinements cérébraux. Au plus près de mon immaturité qui gronde, au plus près de ce qui me harcèle en secret, au plus près de mon trouble, au plus près aussi de ce presque rien commun et incommunicable, de ce grand porche universel qui ne s’ouvre pour moi qu’en moi-même.
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Pas de cinéma avec autrui. Autrui n’est pas un camarade de colloque. J’ai besoin. Je suis en manque. Et je sais tellement quand ça ne va pas le faire ! Les solennités, les réserves, le quant-à-soi, les farouches autonomies, les susceptibilités, les admirations en miroir, les discutailleries, les commentaires interminables sur la connerie des temps, faire semblant d’être dans le même camp, notre bon combat à nous, la lutte finale, les complicités secrètes, oh ! qu’il est déprimant, ce vieux jeu toujours badigeonné de frais ! Et, derrière, plus sinistre encore que le tiroir-caisse, le tiroir-être, le souci de la gueule qu’on a ! J’ai besoin que l’autre déballe tout ça et le vire ; physiquement besoin. J’ai besoin qu’il soit là, besoin pour moi ! Mes rendez-vous, c’est dans les caves que je les donne, dans les greniers, dans les terrains vagues ! Je me fais mal comprendre. Je m’y prends si mal ! Mais comment pourrais-je m’y prendre bien ? En face, ça s’énerve. « Ma liberté ! Mon autonomie ! Ma différence ! » Peu importe. C’est pour mes pieds. Un pro encaisse sans s’étonner. Quelque chose est en train de changer, de s’ouvrir, je ne vois que ça, je ne sais que ça, je ne peux plus être triste, vous non plus. Je me fous du reste.
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Dans les récents temps anciens, que j’appellerai en riant prégirardiens, avant que René Girard n’ait eu cette merveilleuse intuition de la violence mimétique et de la logique du bouc émissaire, exercer le pouvoir, ça tenait debout. Tout provisoire qu’il fût, l’échafaudage était solide et utile : la culture classique, y compris dans la révolte, s’est appuyée sur lui. Au-delà des qualités et des défauts de ceux qui l’exerçaient, ni meilleurs ni pires que les princes d’aujourd’hui, leur gouvernement pouvait s’inscrire dans une logique cohérente. Le mystère avait été circonscrit et enclos, c’est-à-dire sacralisé ; de cette clôture, la vérité était censée procéder et, dans sa foulée, l’autorité. Le dévoilement de la violence et la révélation du lien intime qu’elle entretient avec le sacré ont tout changé. Les vieux systèmes d’autorité font eau de toute part ; aucune propagande ne les remettra en état. D’où, probablement, ce sentiment de déliquescence que l’opinion publique ressent avec finesse et dont elle accuse cruellement ses dirigeants. À tort et à raison. À tort, car ils ne sont pas responsables d’une métamorphose qui les dépasse infiniment : les meilleurs d’entre eux fabriquent, malgré eux, de l’absurde là où les pires de leurs prédécesseurs fabriquaient encore, malgré eux, du sens. À raison, car ils manquent de courage et d’imagination. Ils se cachent. Ils ne veulent pas voir. Ils font semblant. Et finissent par faire du pouvoir une activité perverse. Un bon dirigeant devrait avouer tout ce qu’il ne sait pas : d’abord effarouché par un tel aveu, le peuple en serait vite conforté dans le bien-fondé de ses propres doutes. Il pourrait commencer à réfléchir. Citoyen, chacun apprendrait à le devenir en s’intéressant au bien de la république, aux relations qu’il entretient avec ses voisins proches et lointains, cessant ainsi de se comporter comme l’esclave selon Aristote, comme « l’outil parlant ». Une autre manière d’exercer le pouvoir, voilà la révolution prioritaire. Elle ne dispense pas des autres tâches, mais elle les déclasse. Elle suppose de l’intelligence, de la culture, de l’amitié, de l’audace. Ce qui s’appelle communication. Chez les cancrelats.
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« L’essence de la vérité, écrit Emmanuel Levinas, c’est le partage. » Sans doute, mais il s’agit d’un partage effectivement ou potentiellement universel. Le partage au sein du parti, du groupe, du clan, voilà la sottise, la lâcheté et le crime. Peu avant un voyage au Québec, il y a une trentaine d’années, j’avais été reçu par deux hauts fonctionnaires de je ne sais quel organisme officiel de la francophonie. C’était peu après 68, il y avait de l’enthousiasme dans l’air. J’expliquais à mes interlocuteurs, sur un mode sans doute un peu trop lyrique, qu’une dialectique franco-québécoise pouvait être un magnifique point d’appui pour des initiatives culturelles. Je me rappelle leurs regards de connivence devant l’intrusion de ce non-spécialiste ; j’ai toujours dans l’oreille leur ironie élégante, légère, que je faisais mine de ne pas percevoir. Pour qu’elle devienne plus mordante, plus méchante, j’outrais mon propos. Sans doute voulais-je mener l’expérience jusqu’au bout et comprendre, une fois pour toutes, qu’il est inutile de déranger les morts.
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Ne pas confondre sincérité et authenticité. Être sincère, c’est dire ce qu’on sent, et d’abord se l’avouer. Cela demande de la lucidité et du courage ; il faut vaincre toutes sortes de préjugés et d’idées reçues, desserrer les freins de la sensibilité et de l’intelligence, s’affranchir des contraintes du milieu, de l’époque, oser décevoir des affections, des amitiés. Si, pour l’essentiel, on y réussit, on se retrouve à peu près correctement face à soi-même : c’est un légitime sujet de fierté. Mais la conscience ne vous tient pas quitte. Elle veut mettre à feu le second étage de la fusée. Elle susurre : « Tu as compris que tu étais ceci, et non cela. Que tu es ainsi, et non autrement. Parfait. Et alors ? » Cet et alors ? voilà l’essence de l’humain. « Et ta sœur ? » demandaient, d’une même voix, poètes surréalistes et militants ouvriers quand quelqu’un venait d’établir, dans un domaine ou un autre, la cartographie définitive de ses positions et de ses postures. J’aime cette interpellation familière. « Tu n’es pas seul, mon ami, tu ne peux te penser seul, tu es avec. Tu es avec et tu ne peux parler qu’avec. » Parler avec ta sœur, précisément, raccourci pudique pour désigner le monde fraternel. Sinon ? Sinon, c’est cette naïveté moderniste qu’Aragon, dans Les Aventures de Télémaque, prête à son héros : « Je suis Télémaque, un homme, libre mouvement lâché sur la terre, pouvoir d’aller et de venir. » À quoi Mentor répond : « On jurerait entendre une boule de billard. » Sincérité sans authenticité : langage de boule de billard, et qu’importe où elle roule. Il est difficile de faire entendre que l’être humain ne colle pas à soi-même, qu’il est, au tréfonds de son humanité, principe de détachement. Une de ces navrantes figurines pour confiseries qui font office d’animatrices culturelles à France-Inter cherchait l’autre jour à percer les secrets d’un couple. Lui, il était comme ci, pas comme ça. Elle, comme ça, pas comme ci. « Mais alors, constatait l’innocente avec une désolation piquée de perversité light, mais alors, entre vous, ça ne peut pas fonctionner ? » « Va te faire voir, patate ! » lui eût-on conseillé à Montrouge, non sans justesse. L’aimable dindinette était là au cœur de l’imposture d’aujourd’hui, elle en décrivait le symptôme le plus révélateur : l’idée que l’être humain fonctionne. Des beaux quartiers aux banlieues chaudes, si vous proposez à un jeune une explication dans laquelle il sent confusément une menace pour cette assiette de nouilles tièdes qu’il appelle sans rire son autonomie, il vous lance, sûr de mettre dans le mille : « C’est vous qui le dites ! » À quoi la seule réponse possible, le dernier moyen d’assurer le contact, si l’on avait le bras moins faible que Don Diègue, serait la légitime, la salutaire paire de claques assortie de ce constat : « C’est aussi moi qui te la donne ! » Remède dangereux : vous verriez refluer vers vous, à l’instant, la valeur à la bouche et la pédagogie au canon, l’armée en déroute de la trop incertaine bataille d’Artémis. Ils le tiendraient, leur bouc émissaire !
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Je ne sais pas de quoi procède l’authenticité. À coup sûr, elle n’est pas le cache-sexe de la sincérité. Je sais que je suis moi. Je ne le sais même que trop. L’admettre a été un rude combat. Passons. Tout ce mal pour ne pas trop se déguiser ! Et à peine se sent-on enfin presque égal à soi-même qu’on s’aperçoit que l’équation est fausse. Le compte n’est pas bon. Je ne suis pas la somme de ce que je trouve en moi. Il manque quelque chose, comme lorsque deux centimes d’euro disparus mettent trois pages de registre comptable en folie. Les centimes d’euro, on les retrouve. Les centimes d’authenticité, jamais. D’un côté, une somme d’expérience et de réflexion, de mémoire et de jugement, de désirs et de blessures: un être humain, quoi ! De l’autre, deux centimes d’authenticité qui, sans articuler la moindre explication, vous mettent l’Artémis dans toute l’existence. Et même pas d’effets collatéraux positifs ! Rien. L’authenticité n’entraîne aucun bonus, aucune infaillibilité, aucune invulnérabilité. Au contraire, c’est le triomphe de l’à vif, du doute, de l’embarras. Avec un tout petit grain de certitude, peut-être, mais insaisissable, et qui ne supporte pas l’atmosphère extérieure.
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Vous voulez faire preuve d’authenticité ? C’est déjà raté. Bavardage, intentionnalité, principes, bêtises. L’authenticité, on la suit sans savoir qui elle est, comme un dragueur suit un jupon : un mélange de goût et d’habitude pour fuir l’ennui, pour échapper au tout fait, au trop beau, au tout n’importe quoi. Un obscur besoin d’exister. De correspondre, plutôt, d’exister en correspondant. À quoi ? Je ne sais pas. Tout cela est assez décourageant à raconter : en vérité, il n’y a rien à raconter. Authentique, vous ne savez jamais si vous l’êtes ; d’ailleurs vous vous en foutez. L’authenticité vous pète entre les doigts comme une fusée du 14 juillet. Vous ne la reconnaissez jamais qu’a posteriori, aux dégâts qu’elle a provoqués. Le plus souvent, elle vous laisse embarrassé, comme si vous aviez proféré une énormité. Vous vous sentez gamin, nettement au-dessous de tout.
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Puis vous revenez à la vie ordinaire. Elle a changé. Quelque chose fait bouillonner les choses, les êtres, les mots. La réalité a pris du volume. On la dirait enceinte d’une absence plus réelle qu’elle. Tout est là, à sa place, mais comme provisoirement, accidentellement. Tout manque à sa place, disait superbement Lacan. Vous-même, à votre place, vous vous sentez manquer ; c’est un sentiment très désagréable. Il vous faut du temps pour comprendre que votre place, c’est la place de celui qui ne trouve pas sa place. Un peu plus de temps encore pour admettre que les autres sont comme vous. Beaucoup, beaucoup plus de temps pour vous dire qu’il y a là un mystère profond et qu’il n’y a pas de solution à chercher à ce qui n’est pas un problème. Alors, plus vous vous sentez présent, plus vous laissez tomber, plus vous vous laissez tomber. Comme le dit Aragon, ma mauvaise fréquentation : « Être un homme, c’est pouvoir infiniment tomber. » Selon les heures et la digestion, la tristesse l’emporte, ou la joie. Une tristesse, mais heureuse. Une joie, mais inatteignable. Cette fois, vous êtes mis à feu, vos vices et vos vertus avec vous. Tous vos comptes sont faux, et c’est parfait comme ça.
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Vertu ?

Et non pas par vertu car nous n’en avons guère
Et non pas par devoir car nous ne l’aimons pas

Péguy. Peu importe, écrivant cela, à quoi il pense. Tout est dit.
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Ménage. Voirie. À peine fini France-Brésil, je zappe. Sur une autre chaîne, Tapie explique que l’équipe de France est nulle, nulle à chier : évident, puisque la plupart de ses joueurs – faute de fric, d’artiche, de blé, de flouze, de fraîche, de grisbi, d’oseille, d’osier, de pépètes, de pognon, de tune – doivent s’expatrier. Un pataquès comme ça, ça ne s’invente pas ! Bravo, l’artiste ! Mais le prophète en vient aux choses sérieuses. Comment qu’ils sont, les Français, dites donc ! On leur demande s’ils sont heureux : ils répondent, à une très forte majorité, qu’ils le sont. On leur demande si les autres Français sont heureux : ils répondent, à la même majorité, qu’ils ne le sont pas. Allez vous y reconnaître ! Ho ! ho ! ho ! ho ! Ha ! ha ! ha ! ha ! La très hypothétique pensée de Tapie ne hante pas mes songes ; je ne peux toutefois oublier quel cas ont fait de cette lumière les vedettes de la gauche. J’espère pour lui qu’il en rit toujours. Ô cristalline finesse des éléphants et de leur immense cornac ! S’y fie qui veut, moi je me gare. La fausse contradiction de Tapie, il suffit d’avoir écouté les gens cinq minutes pour ne pas s’en étonner. Vous demandez à un employé s’il est heureux. À l’instant, tous les réflexes se déclenchent. Ne pas parler vraiment de soi. Ne pas se mettre en avant. Ne pas frimer avec des idées générales. Garder ses états d’âme au chaud. Penser au bonheur à ras de terre, ça fait plus modeste : finir le mois, garnir le frigo. Sur ce plan, on ne peut pas dire que c’est la cata permanente. Il y a pire, bien pire. « Oui, Monsieur, oui, je suis heureux. » Vous lui demandez alors si les autres le sont. La question l’écarte un peu de lui-même, sa tête se met en vacances. Parler des autres, c’est plus sérieux que parler de soi, plus facile aussi. Depuis les cathédrales et la révolution, il y a des gens qui prennent les autres au sérieux. En pensant à eux, ils disent leur cœur : « Non, Monsieur, non, ils ne sont pas heureux. » Si vous n’avez pas les portugaises ensablées par le fric, l’artiche, etc., vous n’entendez plus ni je ni ils. Vous entendez nous. Un nous sans prétention, terriblement humble, sans réplique. « Non, Monsieur, non, nous ne sommes pas heureux. » Ménage. Voirie.
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Tous les désaccords avec Dominique de Villepin que j’ai pu entasser ne me font pas oublier sa superbe réaction à la guerre de Bush. Un moment de vraie noblesse résiste à tout. Qu’est-ce qui s’est donc passé ? Voici mon roman. De grandes aspirations, des élans qui isolent, du Chateaubriand là-dedans. Une jeunesse non hexagonale. Il respire plus large. N’est pas ami d’Edouard Glissant qui veut. Mais il existe des mélanges détonants. La vilaine greffe du pouvoir sur la poésie. L’ENA, cet Artémis des ambitieux. Le romantisme de la puissance. On ne passe pas impunément de Chateaubriand à EADS. De Gaulle comme phare, mais aussi comme prétexte. N’avait-il pas, lui aussi, le sentiment de la grandeur ? Halte-là ! Ce n’était pas le même. L’argent, il savait que ça se tient en laisse, que ça ne fait jamais partie de l’épopée. De Gaulle respectait les intendants fidèles mais ne ratait jamais une occasion d’humilier les managers prétentieux. Il venait de la dissidence, pas de l’ENA. Villepin n’a pas cette chance. Il n’a pas compris que le non à Bush et le non au référendum, c’est le même, métaphysiquement le même. Villepin est dans le faux plein. Il manque d’un manque. Il sait le monde, il ignore le peuple. Le peuple, pas le populo, pas l’opinion publique revue par les consultants. Mais il a marqué un beau but contre Bush. Son parti, c’est zéro moins zéro plus zéro ; lui, je ne l’enterre pas. Je lui souhaite une révolution intérieure, beaucoup de solitude. Connaître le peuple, c’est se connaître soi-même. Je ne peux m’empêcher de lui souhaiter bon courage. Ce qu’il a fait, les autres ne l’avaient pas fait et ne l’auraient pas fait. Vous savez ce qu’ils racontent ? S’ils ont suivi Papa Bush, c’était pour libérer le Koweït ! Et ta sœur ?
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Ce n’est pas Versailles, ce jardin, mais il y en a quand même un bon petit bout. Au moment de pousser la tondeuse, l’apprenti jardinier raisonne en cartésien. Sérier les difficultés. Aujourd’hui, jusqu’aux pommiers : demain, au-delà. Et par bandes successives, à la manière des bœufs qui tracent le sillon. Conclusions. Ennui : le jardinier se sent devenir train de banlieue. Épuisement : mal au dos du fait des constants demi-tours. Ce matin, mon ami, tu pars pour n’importe où. Tu suis la tondeuse et ta fantaisie. Amples courbes féminines, décrochages soudains, un coup vers les groseilles, un autre vers l’ombre du poirier. Tu ne réfléchis pas, tu n’échafaudes aucune stratégie. Un jardin, ça ne se conquiert pas, ça s’épouse. Demain tu regarderas tes traces d’aujourd’hui, elles te suggéreront d’autres aventures. La nature, c’est toi ; et c’est elle qui pense. Tu vois bien que tout est à l’envers. Quand tu es sous le cerisier, à essayer de devancer les oiseaux, l’arbre change de sens. Il descend du ciel, les cerises sont des petites boules de Noël.
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D’ici au prochain Marché, courant septembre, nous allons travailler à une réorganisation de Résurgences. L’occasion en est la sortie, début octobre, des quatre premiers ouvrages d’une collection Vox populi à laquelle je pensais depuis longtemps, et qu’un jeune éditeur de Metz a bien voulu accueillir. Résurgences consacrera une place importante à ces petits livres d’entretiens. Voici comment je les présente : Le peuple n’est pas une machine à valider les problématiques des partis, des médias, des puissants. Il a ses raisons. Il est capable de juger et de sentir, de suggérer et de vouloir. Dans un monde en perpétuelle transformation, dans une démocratie menacée par les groupes de pression, le vote est un moyen d’expression nécessaire mais radicalement insuffisant. La collection Vox populi publie des témoignages d’hommes et de femmes de tous les âges et de toutes les conditions sociales désireux de parler d’eux-mêmes, de parler du monde, de parler d’eux-mêmes dans le monde.

(juillet 2006)